Philosophie

Du besoin de philosopher en ces temps d’épidémie

« Mobile Virus World », TVBOY (Barcelona, photo : © Pau Barrena/AFP)

Comment tirer des leçons de ce que nous vivons tous à des degrés différents et dans des conditions différentes sans faire la leçon ? A l’heure où le confinement s’internationalise de plus en plus et où le monde se construit autour de cette immobilité contrainte mais désirable, le philosophe Jérôme Lèbre a mis en place depuis plusieurs semaines une chaine Youtube intitulée clairement Philosopher en temps d’épidémie. Elle diffuse quotidiennement une nouvelle intervention d’un philosophe cloîtré chez lui quelque part dans le monde, et cependant par ce biais en dialogue avec tous les autres. La visibilité de cette chaîne toujours croissante provient de l’importance des problèmes soulevées et de la diversité des interventions. On loue souvent la dimension inactuelle de la philosophie ; or, cette inactualité n’est pas une indifférence au présent, à l’actuel. Elle est bien plutôt l’occasion d’un privilège donné à la réflexion, pour différer, pour ne pas commenter, pour ne pas seulement décrire, et tenir une parole plutôt qu’un discours. Penser l’urgence se fait dans l’urgence. Loin de l’information, des journaux de confinements ou encore des « il faut », ces prises de paroles philosophiques sont l’occasion d’ouvrir des fenêtres sur le monde comme il va. De Jean-Luc Nancy à Avital Ronell en passant par Jean-Clet Martin ou Michel Deguy, de la France aux Etats-Unis, en passant par le Brésil ou le Chili, veuillez retrouver, ci-dessous, les liens vers les vidéos publiées sur la chaîne Youtube — liste que nous renouvellerons régulièrement au fil des prochaines interventions.


  1. Jérôme Lèbre, Bande annonce

Quels seront les effets du coronavirus sur ces deux grands corps collectifs que sont le corps politique et le corps médical ? Qu’en est-il de nous, face à cette menace indéterminée, qui peut être mortelle ? Comment allons-nous vivre immobile ? Pouvons-nous, dans l’isolement, inventer de nouvelles formes de communauté ? Devons-nous faire confiance à la technique, si critiquée pour des raisons écologiques, pour maintenir nos liens affectifs et sociaux ? Nous répondrons progressivement et collectivement, grâce au corps disséminé des philosophes !


  1. Jérôme Lèbre: Nous ne sommes pas en guerre, nous sommes en lutte

En répétant « nous sommes en guerre », Macron s’est inscrit dans une vaste répétition qui a mené des guerres déclarées à d’autres Etats souverains jusqu’aux guerres sans ennemi étatique, aux guerres en temps de paix: guerre contre le terrorisme, et maintenant guerre contre un virus, qui se déclare certes, mais ne s’adresse et ne répond à personne. Ainsi se prépare la concentration des pouvoirs, l’appel à l’ordre, la fermeture des frontières. Or la confrontation au virus devrait se nommer lutte, ce qui implique une tout autre perspective, à la fois sur le rôle de la science et sur notre rôle.


  1. Jean-Luc Nancy : Un trop humain virus (A Much Too Human Virus – English subtitles)

Premier invité de notre chaîne « Philosopher en temps d’épidémie », Jean-Luc Nancy nous offre un texte magnifique sur l’inscription de l’épidémie dans une époque de mutation de la société, laquelle révèle de mieux en mieux que l’humain n’est ni surhumain ni transhumain. Cette intervention s’écarte implicitement mais franchement de l’interprétation « politisante » de l’épidémie par le philosophe italien Giorgio Agamben.

3.bis : Traduction en chinois Jean-Luc Nancy, « Un virus trop humain » : 「一种太任性的病毒」被邀人让-吕克·南希,译者不不,校稿灵川。


  1. Michel Deguy : lecture de « Coronation »

Michel Deguy lit pour nous son poème « Coronation », paru dans la revue Po&sie, et dont le titre apparaissait dans le texte offert à la chaîne par Jean-Luc Nancy, « Un virus trop humain ». Le poète philosophe livrera ici même une continuation en prose ; entre-temps, comme ensuite, ce jeu d’échos se poursuivra, d’intérieur en intérieur, de vidéo en vidéo, en réponse au vers : « nos confins débordent le confinement ».

4.bis: Traduction en japonais: Michel Deguy, Coronation 「コロナ化」ミシェル・ドゥギー 


  1. Jérôme Lèbre : Pour une décoronalisation

En guise de remerciements aux 8000 visiteurs de la chaîne « Philosopher en temps d’épidémie » et aux 400 abonnés en deux jours… « Coronation », mot transporté en français par Michel Deguy, existe en anglais… « Décoronalisation » est un mot qui n’existe nulle part, mais indique l’endiguement (politique) de l’épidémie, le travail des corps et de la médecine luttant contre le coronavirus, et tout autant un processus en lien avec la décolonisation (évoquée au début du texte de Jean-Luc Nancy, premier invité de cette chaîne). Comme cette dernière, la décoronalisation trouve son lieu dans la lutte, les décisions officielles, mais aussi dans les esprits, les corps, les cœurs. Elle commence en même temps que la pandémie et prend une autre voie, celle de la libération. C’est un drôle de mot pour décrire, entre bien d’autres efforts, le commencement et le projet de « Philosopher en temps d’épidémie ».


6. Coralie Camilli : L’attente, l’espérance et le désespoir : une expérience du temps

Nous sommes dans l’attente : une expérience du temps que la philosophie juive entend comme structure ; soit l’événement espéré à chaque instant restaure, restitue, soit il instaure une nouvelle réalité historique… Une très belle interprétation de notre présent offerte à notre chaîne par Coralie Camilli.


  1. Michel Deguy : Tout le monde ne peut pas faire comme tout le monde

Après sa lecture du poème « Coronation », Michel Deguy nous offre une réflexion en prose sur le vivre en commun à l’échelle du monde en temps de pandémie.


  1. Maud Meyzaud (Allemagne) : Le confinement national – une comparaison franco-allemande 

Maud Meyzaud, philosophe française vivant en Allemagne, livre une comparaison philosophique percutante des allocutions d’Emmanuel Macron et d’Angela Merkel face à la crise sanitaire.


  1. Jean-Clet Martin : « Vivre après ? »

Nous ne pouvons ni émigrer sur Mars ni muter sur Terre. Il nous faut bien penser en confinement, placés aux confins du monde comme nous le propose la science-fiction, finalement très réelle. Confinés, nous le sommes non seulement par la diffusion d’une maladie mais par les limites d’une Terre qui s’essouffle et nous oblige à repenser l’Ethos comme Ethologie, une éthique pour nos modes d’existence.


  1. Jérôme Lèbre : Que savons-nous de l’immobilité ? Savons-nous au moins la vivre ?

 Demandons-nous, en cette période d’accélération de la diffusion du coronavirus et de confinement contraint des populations, quel est notre savoir et notre expérience de l’immobilité… en la distinguant bien du désir de ralentissement qui semblait tant nous obséder il y a quelques jours. Réactualisation d’un ouvrage paru il y a deux ans, Eloge de l’immobilité.


  1. Laurent de Sutter (Belgique) : Logistique des pandémies

L’expérience du virus semble être l’expérience du radicalement autre. Et si ce n’était pas le cas ? Et si l’expérience des pandémies était l’expérience d’une relation plus fondamentale à ce qu’est un monde ?


  1. Marcia Cavalcante Schuback (Suède, Brésil) : L’ isolement du monde

Penser en temps de pandémie, c’ est penser en temps d’isolement, non seulement vis-à-vis des autres mais du monde. Mais que veut dire s’isoler chez soi, dans l’isolement du monde ? Comment la pandémie donne-t-elle à penser plusieurs sens de la vulnérabilité, comme de la demande de lieu ?


  1. Andrea Potestà (Chili) : Politiques des catastrophes » (subtitulos en español)

Une réflexion critique autour de l’actualité, qui met l’accent sur l’usage politique des catastrophes et des psychoses collectives qui en dérivent. Quand la catastrophe perd son caractère d’exceptionnalité et de discontinuité historique, on court le risque d’un langage politique uniquement préoccupé par la défense économique du donné et la protection conservatrice de la vie.


  1. Gérard Bensussan : L’événement détermine le programme

Choses vues, ou lues, en temps de confinement: de la frontière, de la peur et du ricanement du « dernier homme »


  1. Alexis Cukier: Capitalisme, vie et mort à l’heure du Coronavirus

 La crise en cours – qui est sanitaire mais aussi écologique, sociale, économique et politique – rend visible la puissance mortifère du capitalisme, accélère sa tendance vers l’écofascisme, et nous place, d’ores et déjà, devant cette alternative : travailler à en mourir ou travailler pour la vie ?


  1. Juan Manuel Garrido (Chili) : Le politique face à la pandémie (English subtitles).

L’expérience du COVID nous permet de poser la question du sens et des limites du politique. D’une part, cette expérience semble renvoyer à la scène primaire de la conceptualisation traditionnelle du politique: l’auto-identification d’un groupe au moyen de l’identification d’un élément qui reste étranger à ce groupe. Or, l’étranger que nous identifions est indissociable du dispositif techno-économique qui rend possible aujourd’hui notre vie elle-même sur la planète. Le politique se voit ainsi, d’autre part, continuellement dépassé par le mouvement d’autoproduction de la vie humaine – mouvement qui produit, simultanément, les modalités de son autodestruction. Est-il possible de donner un sens au politique qui ne se réduise pas au projet de gérer ce mouvement? En tout cas, un projet politique ignorant ses limites reste sans doute condamner à l’insignifiance.


  1. Frédéric Neyrat (Etats-Unis) : Commune absence

En réduisant tout au même, et à la mort, en fabriquant une sorte de wilderness 2.0 dépouillée d’humains, le coronavirus COVID-19 rend manifeste ce qui nous manque: un communisme de la distance qui saurait convertir notre commune absence au monde.


  1. Avital Ronell (USA – F) : Salut, hello (testing 1, 2, 3)

La philosophe américaine Avital Ronell nous livre un magnifique salut, à la fin impressionnante… Plus précisément elle explore l’événement même du « salut » face à la maladie, un motif qui court de Hölderlin à Jean-Luc Nancy: cette structure qui s’impose, à distance de la vérité, en passant par la technologie du test et les rumeurs, change la signification du corps politique.


  1. Nami Başer (Turquie) : Peut-on « confiner » activement ?

Condillac est le premier à employer transitivement le verbe confiner. Nous pourrons jouir de notre finitude dans les confins de notre rencontre avec le virus, masque de la mort dans l’actualité.


  1. Jérôme Lèbre : Vitesse et invisibilité de « l’ennemi »

Que l’ennemi soit invisible, ce n’est pas nouveau. Et aucun mode de vision ou de télévision ne peut compenser ce fait, toujours lié à la vitesse des attaques. Mais ici seul ce que l’on voit le moins, une recherche à long terme, le fonctionnement quotidien de l’hôpital, la vigilance démocratique d’un peuple qui ne se montre pas, est à la mesure d’un virus qui est plutôt de l’ordre de l’adversité.


  1. Cory Stockwell (Canada) à partir de 19h le 05 avril : Il n’y a rien de nouveau dans le coronavirus (English subtitles)

On dit qu’avec le coronavirus, le monde a changé, mais ce n’est pas le cas, au point qu’on n’attend qu’un retour à la normale. Mais il se peut qu’on se trompe en cherchant un nouveau monde, au lieu d’insister sur ce monde-ci. Cette intervention propose, à travers une réflexion sur Blanchot et Sebald, de chercher des ressources pour la création, non pas en sortant du désastre où nous nous trouvons, mais en le fragmentant, en l’ouvrant à lui-même.


22. Invité, Jörn Etzold (Allemagne) : Peut-on mourir de mort naturelle ?

La crise actuelle rend manifeste le rapport que nos sociétés entretiennent avec la mort et avec ce simple fait que nous sommes tous mortels. Jörn Etzold examine les rapports entre la maladie et la mort à partir de deux tragédies de Sophocle, Œdipe Roi et Antigone, et de leurs lectures par Friedrich Hölderlin et Jacques Lacan. Le texte en français à été révisé par Maud Meyzaud.


23. Invité, Jean-Luc Nancy : Le mal, la puissance

 Jean-Luc Nancy, après « Un Virus trop humain », nous offre une seconde lecture inédite, allant de l’état du monde révélé par l’épidémie due au Coronavirus à une pensée du mal : entre maladie, malheur et malfaisance… et jusqu’à la capacité d’autodestruction de tout ce que nous avons nommé « bien ». Quelle issue dès lors ? Sans doute pas dans un discours de la puissance…


24. Invité, Patrick Llored : Un aveuglement collectif

La pandémie actuelle, nous dit Patrick Llored, est le tragique et historique résultat d’un aveuglement collectif qui a touché les institutions et l’État en particulier. Celui-ci savait et n’a pas agi ! Philosopher c’est dès lors tenter de comprendre l’abîme entre le savoir et la décision. Autrement dit, la bêtise du souverain.


 25. Invité Lao Vanglao, trois fonnkèr : Au nom du NOM, Kovidazé (Épigrammé) et Konfiné (Confiné)

Pour la 25ème Vidéo de la chaîne, Lao Vanglao lit sur une musique originale de Farid Aubras, en créole réunionnais et en français, trois fonnkèr qu’il vient de composer. Une nouvelle perle après le poème de Michel Deguy (Coronation).


26. Invitée, Danielle Cohen-Levinas : Le déshumanisme

« Faire face » à la pandémie est depuis plusieurs semaines le mot d’ordre auquel nous sommes tenus. Ce « faire face » s’oppose en tout point au face-à-face éthique que l’humanité de l’homme appelait de ses voeux. Ne sommes nous pas en train d’assister à la naissance d’un déshumanisme qui décline une logique politico-médicale implacable, dont les maîtres mots, tels que « confinement » ou «gestes barrières », seraient les symptômes face auxquels pour l’heure nous sommes sans réponse ?


 27. Invité Alexander García Düttmann (Allemagne) : Lettre à Oliver

« Rien dans les dernières semaines ne m’a autant frappé que l’interminable défilé ou parade des scientifiques, experts, chercheurs et médecins, des universitaires, artistes et hommes politiques, des sociologues, philosophes, politologues, historiens et acteurs culturels. Tous savent quelque chose sur la signification de cette pandémie et de ses effets. Elle doit annoncer la fin du capitalisme, elle fait surgir une nouvelle solidarité sociale, elle ratifie l’état d’exception universel qui réduit la vie à une vie nue. Tout se passe comme si ce cortège des esprits s’était mis en mouvement avant même qu’on puisse parler d’une épidémie, voire d’une pandémie. »


28. Invité, François-David Sebbah : Dans la catastrophe douce, les textes de philosophie

Quasiment en même temps qu’Alexander García Düttmann, mais en prenant une voie différente, François-David Sebbah s’interroge sur la légitimité des discours en temps d’épidémie : il fallait que cette chaîne se pose ainsi la question de sa propre légitimité ! Son approche se déroule en deux épisodes: (I) Nous vivons à certains égards ce qu’on pourrait nommer une « catastrophe douce » dont l’un des effets de bord les plus frappants est qu’elle s’accompagne, de manière strictement simultanée, de l’inflation de son commentaire : commentaires de tous ordres, dont des commentaires « philosophiques ». (II) Question naïve : parmi toutes ces paroles et tous ces textes (« philosophiques »), comment s’y retrouver ? Comment caractériser ce qui compte ?


29. Invité, Tomás Maia (Portugal): Le commun des mortels – penser la quarantaine mondiale

L’humanité est la communauté qui partage la mortalité. C’est la communauté sans immunité (totale) : la com-munauté ! Mais justement : le fantôme de la co- immunité absolue empêche l’institution de la communauté politique; il constitue, probablement, le mal collectif de l’Occident.


30. Invité, Norman Ajari (Etats-Unis) : Comorbidité

Les Noirs, et plus particulièrement les hommes noirs, sont les principales victimes de l’épidémie de COVD-19 aux États-Unis. Selon le Dr. Anthony Fauci, une tendance à la comorbidité en serait responsable. C’est exact; mais ce qui est en jeu n’est pas seulement la présence d’affections médicales antérieures: c’est la mort sociale qui nécrose la vie des hommes noirs depuis la traite transatlantique.


30 bis. Guest, Norman Ajari (USA) : Comorbidity (vidéo disponible également en français sur la chaîne)

Black people, and especially Black males, are the main victims of the COVD-19 epidemic in the United States. According to Dr. Anthony Fauci, a tendency towards comorbidity is to blame. But what defines this state of comorbidity is not only the presence of preexisting medical conditions: it is a social death that structurally necroses Black male life, dating back at least the Atlantic slave trade.


31. Invitée, Silvia Dadà (Italie) : La captivité

Le sentiment de malaise que nous ressentons dans ces jours de confinement, donc d »inactivité et d’éloignement social, montre que nous ne sommes que d’une manière paradoxale dans un moment « historique ». Levinas, dans ses Carnets de captivité, avait souligné cet écart vis-à-vis de l’histoire, mais aussi la proximité entre cette situation et l’accès à la transcendance d’autrui. Une très belle lecture de notre période par Silvia Dadà.


32. Invité Lucrèce (Rome ): « Maintenant je vous dirai la cause de l’épidémie »

Traduction en français par José Kany-Turpin


33. Invité, Tacettin Ertuğrul (Turquie) : La pandémie, la vie et les télé-technologies

La pandémie nous a montré encore une fois que le monde était si fragile… La vie humaine reste toujours ouverte aux nouvelles médiations, mais à la destruction aussi. Elle peut être dite « pharmacographique ». Ce serait cela, la vie d’un vivant singulier : l’écriture comme ouverture à l’autre, et donc l’inscription de la survie. Ainsi, malgré le confinement, l’autre est ‘chez nous’ grâce aux télé-technologies.


34. Invité, Jean-Claude Monod : Trois paradigmes d’état d’urgence sanitaire

L’actuel état d’urgence sanitaire est exceptionnel mais il n’est pas tout à fait inédit. Les mesures mises en oeuvre rappellent, dans leurs variantes, deux grands paradigmes de ‘plans d’urgence’ mis en place dès le Moyen Âge pour faire face, respectivement, aux épidémies de peste et de lèpre. Mais ces analogies ont leurs limites, et le paradigme nouveau qui se construit prend place dans des coordonnées démocratiques qui imposent leurs propres exigences.


35. Invité, Aurélien Barrau : Jean Genet – le condamné amour

Pour penser en tant de confinement, une infime balade avec l’un des poètes les plus séditieux de l’histoire contemporaine qui, précisément, écrivit essentiellement en prison.


36. Guest / Invité, Shaj Mohan (Inde) : The Crown of the Stasis / La Couronne de la stasis (sous-titres)

Vidéo en anglais sous-titrée en français, traduction Sarah Grèzes – Besset

Health is concerned with the whole and in this sense it used to be called Holy. When something is incapable of being whole we say that it is sick, or that there is stasis. Anastasis is the power to overcome stasis.

La santé concerne la totalité (whole), et en ce sens peut être dit sacrée ou sainte (holy). Quand quelque chose échoue à former un tout on peut le dire malade, ou voir là cette forme de blocage qui se nomme stasis. L’anastasis est la capacité à dépasser cette stasis.


37. Jérôme Lèbre : Le confinement peut-il tuer la grève ?

Le blocage que nous vivons, accompagné du surmenage de certaines professions, laisse-t-il une chance aux grèves présentes et futures ? Que devriendra la grève, donc encore l’arrêt, au moment de la « reprise » ?


38. Invité, Jean-Luc Nancy: Une question de liberté

Une jeune femme a subi quatre heures de garde à vue le mercredi 22 avril pour l’affichage d’une banderole portant le slogan « Macronavirus, à quand la fin »: un acte policier injustifié, minable même, exigeant une mise au point sur la liberté en temps d’épidémie et au-delà.


39. Invitée, Safaa Fathy (Egypte, France): Souffler un autre esprit / Breathe another spirit (subtitles)

Habeas corpus est un droit fondamental qui régit le confinement et garantit la souveraineté de soi sur son propre corps. Ce droit dans l’exceptionnalité de ce moment est suspendu d’une façon inédite. Trop d’immunité se transforme en auto-immunité mortifère et sacrificiel.

Habeas corpus is a basic right governing confinement and guaranteeing to each sovereignty over their own body. This right is suspended in an unprecedented manner in the exceptionality of this moment. Too much immunity is transformed into deadly, sacrificial autoimmunity.


40. Invité, Rodophe Burger : « Bleu de Chine »

Rodolphe Burger nous offre un titre inédit, qui continue le trajet du poème « Coronation » à travers cette chaîne: cité par Jean-Luc Nancy (vidéo 3) puis lu par son auteur Michel Deguy, (vidéo 5) il se loge maintenant dans une reprise du « Déluge » de Kat Onoma. musique: Burger/Calpini d’après « Le Déluge (d’après moi) » de Kat Onoma (texte de Pierre Alferi, 1996) avec un extrait de Coronation de Michel Deguy (mars 2020) son et image: Léo Spiritof Enregistré au studio Klein Leberau.


41. Invité, Alfonso Cariolato (Italie) : Privation des corps

L’épidémie produit une complication et, en même temps, une réduction de la réalité. Le monde se divise en nouvelles oppositions qui affectent profondément nos vies. Au niveau mondial, le coronavirus rend encore plus difficile une situation déjà, à certains égards, dangereusement instable. Dans tout cela, nos corps – contraints à des séparations et des distances rigides – s’éloignent les uns des autres, perdant l’imminence d’un contact sans protection. L’épidémie montre de manière dramatique que les corps échappent à toute prise et sont toujours ailleurs.


42. Invitée, María del Rosario Acosta (Etats-Unis) : Nous toucher par la voix – Tocarnos con la voz

Traduction Lucia Touati (activer les sous-titres) : La seule chose qui soit certaine dans l’incertitude que la pandémie amène, c’est que désormais nous ne vivrons plus notre corps de la même manière. De tous nos sens, il semble que la voix soit ce qui mette le plus puissamment en présence, au milieu de l’isolement, ceux que nous ne pouvons pas toucher. Que signifie le fait que ce soit l’écoute qui guide la façon que nous avons de nous toucher ? Quel être en commun peut être pensé à partir des grammaires de la résonance ?

Quizás lo único certero en medio de la incertidumbre que nos trae la pandemia es que en adelante no experimentaremos nuestros cuerpos de la misma manera. De todos nuestros sentidos, pareciera que la voz fuese aquello que más poderosamente trae a la presencia, en medio del aislamiento, a quienes no podemos tocar. Qué significa que sea la escucha la que oriente el modo de tocarnos? Qué ser en común puede ser pensado a partir de las gramáticas de la resonancia?


43. Boccace, lu par Alessandra Salvini : « Naquirent diverses peurs et imaginations parmi les survivants »

Prologue du Décaméron et premier moment d’une trilogie florentine qui sera dispersée sur la chaîne, avec cette fois-ci la voix d’Alessandra Salvini.


44. Invité, Juan Carlos Moreno Romo (Mexique) : Le spectre d’un virus

Le virus, on ne le voit pas, et pourtant on fait —ou on doit faire, du moins, par un fort pressant et même très mimétique (voire, dans certains cas : très autoritaire) « principe de précaution »— comme s’il était partout.


45. Invitée, Alice Pechriggl (Autriche) : Dénégation et agir d’exception

La crise pandémique et le choc angoissant qu’elle déclenche suscitent des réactions affectives et des modes de penser, voire de nier spécifiques qu’une réflexion sur les différents modes d’agir permet d’élucider – aussi dans leur dimension politique.


46. Machiavel, lu par Federico Ferrari : Description de la peste de Florence (1527)

Après Boccace, le deuxième élément d’une trilogie florentine, avec la voix de Federico Ferrari. La mise en ligne de cette vidéo est accompagnée le même jour d’une comparaison entre peste noire et coronavirus par Donald Vance Smith.


47. Invité, Donald Vance Smith (Etats-Unis) : La pandémie, la peste noire, l’espace de panique

Comme la peste noire, l’actuelle pandémie a modifié notre rapport à l’espace : mnémonique, intime, social. La peste noire a donné naissance à la notion d’archives, à l’occupation publique de l’espace par les morts : l’espace comme perte de relation. La représentation après une pandémie consiste à reprendre une relation avec la relation.


47.bis Guest, Donald Vance Smith (USA) : Pandemic, the Black Death, and Panic Space

(Version française disponible) As with the Black Death, this pandemic has altered our relation to space: mnemonic, intimate, social. The Black Death resulted in the notion of the archive, the public occupation of space by the dead: space as the loss of relation. Representation after pandemic consists in taking up a relation with the relation.


48. Jérôme Lèbre : Rester chez soi, en sortir : de l’épuisement d’un lieu à l’exigence de liberté

Rester chez soi s’avère une expérience pauvre ; comment en sort-on ? La mise en mouvement suffit-elle ? Sans doute pas : il faut s’apprêter à vraiment occuper le dehors, en exigeant qu’il soit reconfiguré en fonction de nos efforts pour lutter contre l’épidémie et de nos droits, afin que le déconfinement ne soit pas, comme l’a été en partie le confinement, capté par des puissances économiques ou souveraines.


49. Invité, Irving Goh (Singapour – Etats-Unis) : « Imaginez une pause dans l’activité de philosopher »

Dans cette intervention, je propose une pause dans l’acte de philosopher tant qu’il y a un moratoire sur presque toutes les autres activités humaines à cause de l’épidémie. Et se verrait peut-être, dans le sillage de cette pause, des formes de philosopher qui n’auraient rien à voir avec les humains.


Pause, vidéo non numérotée : Rodolphe Burger, « Que sera notre vie »

La période de confinement aura montré comment les artistes pouvaient,  en utilisant cet « antihasard » qu’est la contrainte, inventer de nouvelles pratiques; l’une des plus notables est la réalisation de titres « confinés », où les musiciens jouent seuls ou ensemble et à distance. Pour faire une pause à l’occasion de sa cinquantième vidéo, la chaîne « Philosopher en temps d’épidémie », oeuvre collective née en temps de confinement, rend hommage à ce travail artistique sous sa forme également collective. Cela grâce à Rodolphe Burger qui nous livre la reprise d’une chanson de son ancien groupe Kat Onoma : « Que sera notre vie », son et images Léo Spiritof, réalisation Fred Poulet.

NB: l’autorisation de diffusion a été demandée à la radio FIP, qui n’a pas encore répondu : cette vidéo est pour cette raison non numérotée et serait retirée au cas où FIP ne souhaiterait pas céder ses droits.


50. La cinquantième, vidéo collective :  où est l’urgence ?

 Une vingtaine de philosophes de différents pays et continents, prévenu.e.s deux jours à l’avance, sont mis au défi d’exprimer, en deux minutes chacun.e, « où est l’urgence ». C’est aussi une manière de mettre en acte  la désynchronisation entre le rythme de la philosophie et celui de Youtube, préalablement soulignée par plusieurs interventions de la chaîne. Cette vidéo 50, diffusée le 11 mai, entend tout autant s’inscrire dans une temporalité qui dépasse la « date » du déconfinement, comme dans un espace plus étendu que la France ou l’Europe, ou à l’inverse plus local. Un essai de contribution au vaste effort collectif qui nous attend pour que la fameuse « reprise » ne soit pas qu’une répétition.

2 réflexions sur “Du besoin de philosopher en ces temps d’épidémie

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